vendredi 27 novembre 2009

Casaques / Cassocks

La guerre de trente ans vit l'apparition de la notion d'uniforme. Mais il ne s'agissait pas d'uniformes comme on les vit apparaître à partir des années 1660 : certaines unités (en général les unités d'élites) se distinguaient par la couleur et les motifs de leurs casaques. On connait ainsi les couleurs des casaques des Mousquetaires du Roi et des Gardes du Cardinal, puis du régiment Cardinal-duc, ainsi que celles des gardes de Wallenstein par exemple. Voici deux autres exemples de cette pratique : les Gardes de Monsieur et les Gardes du Cardinal Infant.

The Thirty Years War saw the emergence of the concept of uniform. We know well the colors of the cassocks of the King's Musketeers and the Cardinal's Guards, and those of Wallenstein's Guards. Here are two others examples : Monsieur's Guards and the Cardinal Infant's Guards.


Uniforme des gardes de Monsieur en 1626 :
"Monsieur eu quatre-vingt Gardes Français portant casaques & bandoulières de velours de ses livrées, leurs casaques chargées devant & derrière de ses chiffres en broderie rehaussée d’or.
Il eut aussi vingt-quatre Suisses qui marchaient devant lui, les dimanches & autres jours de fêtes, tambour battant, encore que le Roy fut à Paris ; mais il ne se trouvait pas aux lieux où était Sa Majesté."

"Mr. had eighty French Guards wearing velvet casaques & straps of his liveries, their cassocks loaded front and back with its figures decorated with gold embroidery."

Source : Mémoires contenant ce qui s’est passé en France de plus considérable depuis l’an 1608 jusqu’en l’année 1636.

Garde du Cardinal Infant en 1634 :
"Le Cardinal Infant était arrivé à Bruxelles dès le 2 novembre 1634 & afin de rendre son entrée plus célèbre, s’était fait accompagner par dix mille chevaux armés de toutes pièces, tant de l’Armée de Flandre, que de ceux qu’il avait amenés d’Allemagne. Il avait cent Gardes Tudesques, vêtus de ses livrées, qui étaient moitié de velours & moitié de taffetas jaune à bandes garnies de passement, houppées de cette couleur, mêlée de tané & ginjolin, & marchaient au devant de lui avec leurs timbales. Il était vêtu en cavalier à la française, portant le même habit qu’il avait à la bataille de Nordlinguen."

"There were a hundred german guards, dressed in his livery, which was half velvet and half yellow silk belt adorned with braiding, houppées of this color mixed with tané ginjolin, and walked up to him with their drums."

Source : Mémoires contenant ce qui s’est passé en France de plus considérable depuis l’an 1608 jusqu’en l’année 1636.

lundi 16 novembre 2009

Les Gardes françaises en 1636 / French guards, 1636

Here is an account of a parade showing the whole regiment (6,000 men strong) of Gardes françaises split in 18 battalions.

« On 21st (january of 1636), the king returned from Versailles to Paris, showed to the Duke his own Guards regiment prepared in 18 battalions in the great plain wich is near the castle of Madrid, where the skill of the soldiers make the Duke admit that they deserve the title of best regiment of the christianity ... »

« Le 21 (janvier 1636). Le roi retourna de Versailles à Paris, fit voir au duc le régiment de ses Gardes disposé en 18 bataillons en la grande plaine qui est proche du château de Madrid, où l’adresse des soldats secondant les commandements du maître, fit avouer au Duc qui est à bon droit qu’on lui donne le titre de meilleur régiment de toute la chrétienté ; encore que la foule des chevaux et carrosses telle qu’on ne s’y pouvait tourner au large, dérobait le plus beau de cet exercice ; car le roi même et toutes les dames y voulurent être. »
Source : Le Mercure François de 1636.

Note : Les Gardes françaises comptaient théoriquement 30 compagnies de 200 hommes soit 6000 hommes. En 1625 le régiment comptait 30 compagnies de 300 hommes soit 9000 hommes. Scinder le régiment en 18 bataillons donne 333 hommes par bataillon en 1636.

(Illustrations de Gardes françaises par Alexandre de Marbot).



















vendredi 13 novembre 2009

Lützen, 16 novembre 1632 (end of Imperial OoB)















(La mort de Gustave-Adolphe à Lützen de Meulener).

Finally, let see the imperial regiments present at Lützen. The list of imperial or ex-league regiments supposed to have fought the battle, and their position within the order of battle, are equally problematic. Here are 3 versions : that of Gualdo followed by the interpretations of Guthrie (who also based on the Swedish Intelligencer, the Sveriges Krig and the 1632 Krieglisten) and Brzezinski (who did not specify his source, out of the Sveriges Krig, but seems to use the same). I don't own any of these 3 accounts and lists.

Pour finir, voyons les régiments impériaux présents à Lützen. Puis il sera temps de passer à autre chose !
La liste des régiments impériaux (ou ex-ligue) présents à Lützen et leur répartition au sein de l’ordre de bataille sont tout aussi problèmatiques. En voilà trois versions : celle de Gualdo, suivie des interprétations de Guthrie (qui s’est aussi inspiré du Swedish Intelligencer , du Sveriges Krig et de la Krieglisten de 1632) et Brzezinski (qui ne précise pas ses sources en dehors du Sveriges Krig mais qui sont à priori les mêmes). Je ne possède pour ma part aucune de ces sources.

Aile gauche 28 escadrons de croates et 3 escadrons de cuirassiers de Cronenberg, Goetz (Gotz), Deffurt, Tersica (Trçka) et Bredau.
Guthrie énumère les régiments Gotz, Piccolomini, Trçka (Tersica), Holk et Hagen (Arquebusiers) en plus des croates.
Alors que Brzezinski liste les régiments Gotz, Piccolomini (arquebusiers), Leutersheim (arquebusiers), Lohe et Loyers (arquebusiers).

1ère ligne : 25 compagnies d’infanterie des régiments Bertaut-Walstein, Chiesa, Colloredo et duc Savelli. Droite : un gros bataillon de 16 compagnies des nouvelles levées de Dohna, Montecucculi et Tersica (Trçka).
2e ligne : 32 compagnies d’infanterie partagées en deux bataillons des régiments de Galas, Grana, Holck (?), Gueis ou Geysa, Prainer (Breuner) et d’autres.
3e ligne : un gros bataillon de 22 compagnies d’infanterie des régiments de Maximilien Walstein neveu du général, Contrès, Fugger et Lauenbourg.
Plus loin, Gualdo dit que les régiments Fugger, Grana, Prainer (Breuner) et Holck, Galas à leur tête, se battent avec acharnement contre les troupes du duc de Saxe-Weimar. Grana et Breuner seraient donc à droite de la seconde ligne et Fugger à droite de la 3e ligne.
Guthrie liste les régiments d’infanterie Trçka (Tresica), Kehraus (ex-Chiesa), Comargo, Grana et Waldstein en 1ère ligne et Alt-Saxon (Saxe-Lauenbourg) et Colloredo en 2nd ligne puis Mansfeld, Baden, Jung-Breuner et Alt-Breuner en 3ème ligne.
Alors que Brzezinski liste les régiments regroupés en bataillons, Comargo, GFZM Breuner, Grana & Breuner, Colloredo & Chiesa, Waldstein & Alt-Saxen (Saxe-Lauenbourg) en 1ère ligne et Breda, Jung-Breuner en 2nd ligne.

Aile droite : 24 escadrons de cuirassiers Piccolomini, Gonzague, Strozzi, Coronino plus pelotons de mousquetaires. Plus deux gros escadrons de cavalerie Colloredo, Reichemberg, Sparr, Schaumbourg et Officutz au-dessus des moulins, 15 escadrons de croates et de dragons de Forgatz et 30 escadrons de cuirassiers conduits par les colonels Maracini et Haraucour, flanqués de 10 escadrons de croates et de hongrois.









jeudi 12 novembre 2009

Lützen, 16 novembre 1632 (Imperial OoB)
















(The battle of Lützen, according to Peter Snayers.)

I will deal today (in french again) with the second difficulty provide by the battle : the formations adopted by the Imperial Infantry. In conclusion, the old Tercios was no long in use, unlike what several engravings tries to show. But there were at least 7 imperial battalia, 4 fighting Gustave-Adolphe and 3 in front of Bernard of Saxe-Weimar. They were, at the beginning of the battle, in 2 lines (5 in the first and 2 in the second, according to Heinrich Holk) but were soon engage in a single line.

La deuxième difficulté pour comprendre la bataille de Lützen vient de la formation adoptée par l'infanterie Impériale.
Les "reporters" du Theatrum Europaeum ont reproduit sur leur gravure 5 grands Tercios : 1 en première ligne, 2 en seconde ligne plus un 3èeme sur la droite derrière les moulins et un 5eme en 3e ligne. On retrouve cette même disposition dans la gravure (datant de 1633) de Friedrich van Hulsen dans Inventarium Sueciae qui est à priori antérieure à celle du Theatrum Europaeum (cf. Brzezinski).
Par contre, les représentations contenues dans le Swedish Intelligencer anglais (1633) ou derrière le portrait de Gustave Adolphe par Giovanni Paolo Bianchi (cf. encore une fois Brzezinski) présentent des bataillons carrés mais plus petits, et non pas en forme de Tercios.
Enfin, la version de Pieter Snayers, plus tardive (peinte une dizaine d'année après) présente les bataillons formés en losange mais pas en Tercios (voir reproductions ci-dessus et ci-dessous).

Heureusement, nous avons une source qui contredit ces formations, qui auraient alors dû réunir plusieurs régiments, ce qui n'était pas l'usage.
Tout d'abord la relation Heinrich Holk, que je ne possède pas mais qui est rapportée par Brzezinski : "5000 hommes de pied en cinq brigades ; le milieu en deux brigades de 1000 et six compagnies de chevaux mixées deux à deux ; et enfin se tenaient cinq compagnies commandées de 500 hommes de pied, et deux escadrons de 12 compagnies de chevaux." Cette relation indique clairement 7 bataillons de 1000 hommes et 5 compagnies de mousquetaires commandées qui faisaient à priori 100 hommes chacune (ou 500 chacune ?).
Incidemment, la relation de Gualdo conforte ce point de vue puisqu'il s'écarte ensuite de cette description de gros bataillons réunissant plusieurs régiments : ainsi, sur l'aile gauche impériale, "L’affaire devint bientôt générale. L’infanterie suédoise était déjà au bord du fossé. Le roi ordonna aux régiments des gardes de le franchir, et se mit en devoir de les soutenir avec quatre escadrons de l’aile droite. Les bataillons suédois s’ouvrirent aussitôt pour donner passage au feu des pièces chargées à cartouche qu’ils avaient avec eux, et suivent le coup pour s’élancer à l’autre bord. Mais Walstein leur avait opposé quatre bataillons soutenus de cavalerie que toute l’impétuosité suédoise ne put ébranler." Alors que sur l'aile droite, du côté des moulins, face à Bernard de Saxe-Weimar : "Tandis qu’on se battait avec cette fureur du côté du roi, le combat s’était engagé à l’aile gauche ou commandait de duc Bernard de Weimar. Les régiments de Loewenstein, Steinbach et Brandstein étaient aux mains avec ceux de Fugger, Holck, Grana et Prainer (Breuner), Galas à leur tête. On s’y battait avec le même acharnement qu’à l’aile droite." Le point de vue de Gualdo est inversé en terme d'aile - il se positionne côté suédois, mais on se retrouve là avec 4 bataillons à l'aile gauche et 3 l'aile droite (le 4e, Holk étant plus probablement un régiment de Cuirassier, d'après le traducteur de Gualdo mais aussi Guthrie et Brzezinski). Bref on retrouve ici les 7 bataillons des deux premières lignes au lieu des 4-5 grosses formations évoquées par les gravures et reprises par Gualdo, qui tente désespérément de faire coincider toutes ses sources !
D'autres auteurs contemporains aux évènements confirment ce point de vue, telle que la version du comte de Kevenhuller, évoquant au moins 3 bataillons sur l'aile gauche : "L’infanterie suédoise fondit tout d’un coup sur les mousquetaires, qui étaient dans les fossés du grand chemin, et les chasse de leur poste, prit sept pièces de canon plantés près des fossés, et les fit jouer avec tant de vivacité sur l’infanterie impériale, que la première, la seconde et la troisième brigade en furent ébranlées, et commençaient à lâcher pied, lorsque le duc de Friedland arriva, les rétablit, et les ramena au combat avec tant de succès, que les Suédois plièrent à leur tour, furent poussés jusqu’au delà des fossés, et sept canons furent pris." Ou encore la version du Soldat Suédois / Mercure françois qui évoque pour sa part 3 régiments impériaux sur l'aile droite : "Le duc (Bernard) ayant ce poste, et étant maître de la campagne entre deux et trois heures, crût qu’il ne restait qu’un poste à forcer vers un moulin à vent gardé par trois régiments impériaux, et se mit en devoir de l’enfoncer, découplant cependant divers escadrons à la queue des fuyards."

En conclusion, même si il est difficile de déterminer le nombre exact de bataillons d'infanterie impériaux à Lützen, il apparait que la ligne impériale soutint le combat avec principalement 7 bataillons et non pas 5 gros Tercios qui, si ils étaient disposés en 2 lignes au début de la bataille, combattirent rapidement sur une ligne : 4 à gauche face à Gustave Adolphe et 3 à droite face à Bernard de Saxe-Weimar.

mercredi 11 novembre 2009

Lützen, 16 novembre 1632 (Imperial OoB)

Sorry for this (long) post only in french. I will deal with the strength of the imperial army at Lützen and conclude that the proposition of Brzezinski (Lützen 1632) and Guthrie (Battles of the Thirty Years War), with 14 or 17,000 men for Wallenstein, are more credible than the 28-32,000 men announced by contemporary authors.












Il y a trois difficultés pour reconstituer l’armée impériale,
- la taille de l’armée (effectifs),
- les formations adoptées par les impériaux,
- les régiments présents.

Concernant les effectifs. Aucun contemporain ne donne les effectifs le jour de la bataille. Les chiffres ci-dessous s’appliquent en général au mois précédant la bataille de Lützen.
Galeazzo Gualdo donne 36,000 hommes à Wallenstein lorsqu’il est près de Nuremberg dont 10,000 pour Holck et Galas, 5,500 pour Grana et 14,000 pour lui-même, y compris les troupes bavaroises d’Aldringer. Mais le total ne donne que 31,500 hommes. Si on y ajoute les 9,000 hommes de Pappenheim lorsqu’il rejoint Wallenstein, le total monte à 41,500 hommes.
Le Theatrum Europaeum donne 40,000 hommes aux impériaux, dont 18,000 hommes pour Galas et Holck et 12,000 pour Pappenheim. Soit 10,000 hommes pour le corps qui restait à Wallenstein à Nuremberg. Wallenstein aurait donc eu de 28 à 32,000 hommes un peu avant Lützen, sans Pappenheim.
Le Soldat Suédois donne 20,000 hommes à Wallenstein, 12,000 à Pappenheim et 16,000 à Galas et Holck pour un total de 48,000 hommes (en octobre). Les pertes des impériaux étant de 10 à 12,000 morts. Le total serait ici de 36,000 hommes avant l’arrivée de Pappenheim.
Le Mercure François reprend mot pour mot le récit du Soldat Suédois.
Le comte de Kevenhuller donne 10,000 hommes à Gallas, 6,000 à Holck, 12,000 à Wallenstein, soit 28,000 hommes.

En fonction des observateurs contemporains, on a donc un effectif hors Pappenheim allant de 28 à 32,000 hommes plus 9 à 12,000 pour Pappenheim. Mais il faudrait défalquer de ces chiffres les pertes endurées lors des combats qui précèdent et l’attrition.

Pour compliquer le tableau, les auteurs récents (Brzezinski, Guthrie) revoient ces chiffres fortement à la baisse.
Brzezinski nous dit “Face à eux il y avait l’armée de Wallenstein que la rumeur donnait à 30,000 hommes, mais en réalité un peu plus de 12,000.
Guthrie nous donne 35,000 hommes, y compris Pappenheim, le 14 octobre. Le 14 novembre, il compte 15 à 18,000 hommes à Wallenstein et Holk, 5,000 hommes à Pappenheim et 6 à 7,000 hommes à Galas. Pour un total de l’ordre de 28,000 hommes dont 5,000 pour Pappenheim.
Les deux auteurs font ensuite une estimation de cet effectif en se servant de la Krieglisten de 1632 (à laquelle je n’ai pas accès), qui recense les régiments et le nombre de compagnies. L’effectif est ensuite obtenu en estimant un nombre d’hommes moyen par compagnie.
Guthrie décompte ainsi, pour Wallenstein, 16,770 hommes soit 9,870 fantassins (avec des effectifs de compagnie compris entre 50 et 150 hommes) et 6,900 cavaliers (avec des effectifs de 20 à 70 chevaux par compagnie). Le corps de Pappenheim compterait 5,000 hommes (2,700 fantassins et 2,300 cavaliers).
De son côté, Brzezinski estime ces chiffres à 13,750 pour Wallenstein (8,550 fantassins et 5,200 cavaliers) et 5,650 hommes pour Pappenheim (3,000 fantassins et 2,650).

Difficile de réconcilier ces chiffres. Les travaux récents divisent par deux les chiffres des auteurs contemporains à l'événement. Il est donc utile de regarder le nombre de compagnies présentes à Lützen.
Brzezinski compte 89 compagnies d’infanterie (plus 45 pour Pappenheim) et 84 compagnies de cavalerie, 25 de croates et 5 de dragons (39, 23 et 9 pour Pappenheim).
Guthrie compte 95 compagnies d’infanterie (plus 43 pour Pappenheim) et 96 compagnies de cavalerie, 25 de croates et 5 de dragons (35, 20 et 7 pour Pappenheim).
A l'époque, Gualdo comptait (pour Wallenstein uniquement) 95 compagnies d’infanterie, 59 escadrons de cuirassiers, 53 escadrons de croates et dragons (de l’ordre de 5 pour ces derniers).
Pour 32,000 hommes dont 40% de cavalerie (18,000 fantassins et 12,000 cavaliers), la compagnie d’infanterie compterait en moyenne 190 hommes et “l’escadron” (Gualdo évoque plus probablement la compagnie) 107 chevaux.

Les ordres de grandeurs sont donc équivalent (89/95/95 compagnies d’infanterie et 114/126/112 de cavalerie). La question se pose donc de la manière de calculer des uns comme des autres.
Au début de la guerre de trente ans, les régiments d’infanterie impériaux étaient à 10 compagnies de 300 hommes soit 3000 hommes. Mais il était possible de lever des régiments de 2000 hommes (compagnies de 200), ce qui se faisait couramment, et certains régiments pouvaient compter que 5 compagnies. Dans les faits, une fois la campagne avancée, peu de régiments dépassaient 1200 hommes, pouvant même tomber à 500 hommes (50 hommes par compagnie). L’effectif moyen calculé à partir des chiffres de Gualdo quelques temps avant la bataille, parait donc surévalué (190 hommes par compagnie est trop proche de l’effectif théorique). Guthrie (104 fantassins par compagnie) et Brzezinski (96 hommes par compagnie) proposent des chiffres plus crédibles.
Le régiment de cavalerie impérial comptait théoriquement 10 compagnies de 100 chevaux soit 1,000 cavaliers, mais en 1632, le régiment comptait en moyenne 500 à 800 chevaux (selon Guthrie).
Guthrie estime un effectif moyen de 55 chevaux par compagnie à Lutzen, chiffre crédible, et Brzezinski donne une compagnie à 46 chevaux. On est dans les deux cas à la moitié de ce que pourrait donner le chiffre de Gualdo.

En résumé, aucun auteur contemporain aux événements ne donne les effectifs réels des impériaux le jour de Lützen. Les fréquents détachements puis regroupements en différents corps (Aldringer, Holk, Galas, Pappenheim) leur compliquent d’ailleurs la tâche. Ceux que l’on trouve sont contradictoires, comme c’est souvent le cas (en fonction du “parti” qui relate l’évènement) et sont antérieurs à la bataille de plusieurs semaines. Il parait donc prudent de suivre Guthrie (Battles of the Thirty Years War) et Brzezinski (Lützen 1632) dans leurs raisonnements.

Prochain sujet : les formations impériales à Lützen.

lundi 9 novembre 2009

Lützen, 16 novembre 1632 (Imperial OoB)








L'OoB impérial est peut-être la partie la plus délicate de l'analyse de la bataille. Il fera donc l'objet de plusieurs messages. Pour cette première étape, je me contenterais de présenter la vision de Gualdo. Je ne sais pas si celui-ci était présent lors de la bataille. Est-il reparti en Italie pour la mort de son père avant la bataille ? je le pense. Ou alors, la vision qu'il avait du champs de bataille, de l'endroit où il se trouvait, n'était pas suffisante ...
L'ordre de bataille présenté par Gualdo semble inspiré de la carte du Theatrum Europaeum (cf. ci-dessus). Or celle-ci présente les impériaux alignés - à tort - en 5 gros Tercios. Et il a dû tenter d'adapter son récit à ce plan - qu'il a nécessairement eut rapidement entre les mains - alors qu'il ne correspondait pas aux faits réels. On s'en aperçoit dans la suite de son récit, qui n'évoque plus que des bataillons de la taille de régiments. Mais avant de continuer sur l'analyse, place au récit...

The imperial OoB is almost the difficultiest part of the battle analysis. But before dealing with this point, let's see the description of Gualdo (who don't seems to be present at the battle but seems to have try to match the account and the -false - Theatrum Europaeum map).

Dès que Walstein sut que le roi avançait sur lui il ne douta pas que ce fut pour l’attaquer. mais le généralissime qui ne manquait pas d’activité, avait pris ses précautions de bonne heure. Pappenheim avertit revenait à grand pas. Walstein avait supputé le temps qu’il fallait pour sa marche et trouvé qu’il viendrait à propos pour le seconder. Cependant il était encore indécis s’il engagerait une action avec les Suédois ou s’il n’aurait pas plus d’avantage à se mettre sous le canon de Leipzig et à laisser l’ennemi se consumer par la faim. Mais le plus grand nombre fit la réflexion qu’en se retirant l’armée aurait l’ennemi à ses trousses dès la pointe du jour, et cet avis l’emporta. l’armée était déjà en bataille, lorsque l’avant-garde des Suédois s’avança avec l’artillerie de campagne à la hauteur du premier poste des Impériaux qui était au-dessus de Lutzen vers le sud près des moulins dont j’ai parlé en décrivant le terrain.
Isolani à l’aile gauche commandais un gros de 28 escadrons de croates et de hongrois, tous montés sur de petits chevaux très-vite à la course. Derrière ceux-ci étaient 3 escadrons de cuirassiers de Cronenberg, Goetz, Deffurt, Tersica et Bredau.
Le corps de bataille était sur trois lignes. La première formée d’un gros bataillon de 25 compagnies d’infanterie des régiments de Bertaut-Walstein, Chiesa, Colloredo et duc Savelli, ayant sept pièces de canon en front. La seconde ligne était de 32 compagnies d’infanterie partagées en deux bataillons des régiments de Galas, Grana, Holck, Gueis ou Geysa, Prainer ou Breuner et d’autres. A leur droite étaient 24 escadrons de cuirassiers du comte Octave Piccolomini, du marquis Gonzague, de Strozzi et Coronino, les colonels à leur tête. Ils avaient entre eux plusieurs pelotons (maniche) de mousquetaires. Près de ceux-ci deux autres gros escadrons de Geronimo Colloredo, Reichemberg, Sparr, Schaumbourg et Officutz barraient le chemin de Lutzen au-dessus des moulins. À leur droite était un gros bataillon de 16 compagnies des nouvelles levées de Dohna, Montecucculi et Tersica, que soutenaient 15 escadrons de croates et de dragons de Forgatz.
L’arrière-garde ou troisième ligne ayant également la forme d’un gros bataillon était de 22 compagnies d’infanterie des régiments de Maximilien Walstein neveu du général, Contrès, Fugger et Henri-Saxe de Lauenbourg. A sa gauche étaient 30 escadrons de cuirassiers conduits par les colonels Maracini et Haraucour, flanqués de 10 escadrons de croates et de hongrois.
L’artillerie soutenue par de bonne infanterie défendait le fossé, et 17 pièces étaient plantées sur la hauteur près des moulins.
Galas menait l’arrière-garde de la droite, dont Cronenberg et Deffurt sergents-majors conduisaient la gauche. Officutz était à la tête de toute l’infanterie, et Walstein au centre accompagné des princes de Toscane, frère du grand-duc, de renaud et Borso d’Este, du comte de Michna commissaire général de l’armée, et de tous les gentilshommes et officiers de sa suite. Schaumbourg commandait l’aile gauche du corps de bataille, et Rinoch, Haraucour et Deodau quartier-maître général menaient l’arrière-garde.
Dès que l’armée fut rangée, Walstein fit approcher de son carrosse les généraux à qui il donna les derniers ordres. Il voulut qu’on dit la messe dans le camp avant d’attaquer. le généralissime se fit ensuite mener le long des lignes, parlant aux troupes avec dignité et exhortant le soldat au mépris de la mort par l’espoir des récompenses, des honneurs et des emplois. Aussitôt que l’ennemi parut, il monta à cheval et attendit fièrement l’attaque des Suédois.

dimanche 8 novembre 2009

Lützen, 16 novembre 1632 (Swedish OoB)



(Swedish ooB according to Theatrum Europaeum)


Il est maintenant temps d'attaquer le délicat sujet de l'ordre de bataille (OdB). Si il ne pose aucun soucis côté Suédois, ce ne sera pas le cas pour les impériaux. Commençons donc par le plus facile... Tout le monde semble d'accord (sauf Gualdo qui fait une erreur, en oubliant, selon moi, de décompter les 7,000 hommes détachés à Birkenfeld), l'armée suédoise comptait de l'ordre de 20,000 hommes dont 6,000 chevaux.

It's time, now, to consider the delicate order of battle, beginning with the easier, the swedish OoB. Everybody agree of the swedish army size : around 20,000 men. Only Gualdo count 27,000 men but he likely forgot to deduct the 7,000 men Gustave-Adolph sent to Birkenfeld.

Mais revenons à la relation de Gualdo.
But here is Gualdo account.

Le Roi n’ayant que quelques domestiques à sa suite et pour toute armure un simple buffle, montait un cheval gris pommelé et conduisait l’aile droite de l’avant-garde qui était de 3,000 cavaliers goths et finlandais. Ils étaient partagés en 6 escadrons et commandés par les colonels Wansleben, Ruthwin et Vitzthum. Cinq pelotons (maniche) de mousquetaires étaient distribués entre ces escadrons pour tirer sur la cavalerie ennemie avant qu’elle fût à la portée du pistolet. Ces cuirassiers étaient tous aguerris, bien montés et armés de pistolets et de larges sabres dont les lames courbées en forme de faux brillaient dans leurs mains. Ce n’est point une fiction quand je dis que le soleil donnant sur ces corps tout couverts d’acier en rendait l’aspect éblouissant et formidable. Venaient ensuite 4 gros bataillons d’infanterie allemande et suédoise, assez espacés entre eux pour que ceux qui étaient derrière pussent y trouver place sans confusion. C’étaient les deux brigades noire et jaune, ainsi nommées de la couleur de leurs casaques, qui marchaient sous 28 enseignes aux armes de Suède ; auxquelles le roi avait joint les brigades bleue et verte formées de 18 compagnies des régiments de Winckel et Relingen et de celui de Bernard de Weimar mené par son lieutenant Wildenstein. A la tête de cette infanterie était le comte Nicolas Brahe de Wisinsbourg (colonel de la brigade jaune) qui marchait quatre pas en avant la pique à la main sous 26 enseignes de différentes couleurs et chargées de devises singulières.
Au corps de bataille étaient 4 autres bataillons étendus sur un large front et disposés derrière les premiers de façon à pouvoir sans confusion remplir l’intervalle d’un flanc à l’autre. C’étaient 34 compagnies d’infanterie des régiments de Stechnitz, Brandtstein, Loewenstein, Steinbach et Anhalt, les colonels à leur tête marchant la pique à la main et vêtus tous de manière à être reconnus du soldat dans la mêlée.
A l’aile gauche étaient 3,000 hommes de cavalerie allemande divisés en 6 escadrons comme ceux de la droite. Ils avaient des cuirasses, des pistolets, de bonnes épées et des massues en fer qui d’un côté avaient un marteau et de l’autre un crochet pour tirer à bas le cavalier ennemi par ses habits ou par les boucles de son armure. Ces 3,000 cavaliers étaient commandés par le duc Bernard de Weimar qui marchait à leur tête, suivi d’une foule de gentilshommes volontaires empressés à apprendre le métier de la guerre sous ce grand capitaine. Cinq pelotons de mousquetaires flanquaient ces escadrons et y étaient mêlés à même intention qu’à l’aile droite. C’est là qu’étaient les 22 escadrons de la garde royale, et les régiments de Karberg, Churlander (Courlandais), Wrangel (en fait, même régiment que Courlande), Wishaufen (Diesenhausen) et Courville.
L’artillerie était distribuée sur le front de la première ligne : 26 pièces de gros canon devant l’infanterie, et 20 pièces de campagne devant chaque aile chargées à cartouche.
L’arrière-garde commandée par le maréchal Kniphausen était de 52 compagnies d’infanterie partagés en 8 gros bataillons, 4 de forme carrée et 4 étendus sur un large front, composés des régiments étrangers de Mitzlaff, Geisdorf, Thurn ou la Tour, Hesse, Kniphausen, Hoffkirch et Guillaume de Weimar. ces 8 bataillons étaient soutenus de 10 escadrons de cavalerie. Les 5 du flanc droit conduits par les colonels Oemens, Boosse ou Boosen, Iseler et Agafelt ou Degenfelt, commandés par le lieutenant-général baron de Hoffkirch, étaient entremêlés de mousquetaires. les régiments de Beckermann, Bulacher, Goldstein, Platen et du lieutenant de Guillaume de Weimar formaient les 5 escadrons du flanc gauche, précédés de leurs colonels qui marchaient accompagnés de gentilshommes volontaires tous bien montés et bien armés.
L’armée rangée, Gustave appela ses généraux, leur donna encore quelques ordres, et fit chanter un cantique par toute l’armée pour attirer la bénédiction de Dieu sur ses armes. il se fit amener un cheval blanc, monta dessus, et fit deux fois le tour de l’armée repassant dans les rangs pour voir ses soldats et en être vu. (…)
Aussitôt Gustave ordonna que le bagage fut mis en sûreté, et fit retirer les femmes et les enfants qui étaient encore entre les lignes. Alors il descendit de son cheval blanc pour en prendre un noir, et dans le même temps l’armée se mit en mouvement ; marchant à l’ennemi au bruit d’une musique guerrière, dont les sons perçants mêlés aux acclamations des soldats portaient la confiance et l'allégresse dans tous les coeurs.


Et voici ci-joint une synthèse des différents OdB. Les OdB contemporains (Gualdo et Theatrum Europaeum) et les propositions d'auteurs récents (Brzezinski, 2001 & Guthrie, 2002).

And here is attached the summary of various OdB (Gualdo & Theatrum Europaeum one's and then, Brzezinski & Guthrie's).

Click on the picture for a large size view.


Lützen 1632 (battlefield)



(Moulins/Windmill de Lutzen in Theatrum Euopaeum)

Avant de passer à la délicate partie des effectifs et de l'organisation des deux armées, un petit mot sur le champ de bataille que Gualdo décrit parfaitement.

Before talking about the OoB, here is a description of the battlefield from Gualdo :


Chaque officier général (suédois) sut retrouver ses enseignes, ranger les bataillons et inspirer aux troupes la confiance dont Gustave était animé. le monarque déploya son armée dans la plaine de Lutzen.

Cette plaine du midi au nord peut avoir une lieue de long. Elle a son côté nord-ouest bordé de quelques bouquets de bois et Chursitz au nord. Ce village situé entre de riants coteaux est un séjour agréable plutôt qu’un lieu de défense. Entre ces coteaux au nord-est le terrains s’abaisse sous une pente douce et parait faire limite entre Chursitz et Lutzen.
Lutzen borne la plaine à l’orient. De là jusqu’au midi le terrain s’élève insensiblement et forme comme un rempart à ce côté sud-est. Il redescend du sud au couchant d’où l’on voit la plaine dans toute son étendue. A une lieue en face de Lutzen est un ruisseau qui borde le sentier depuis les coteaux jusqu’à Chursitz. De ce même point plus occidental si l’on se tourne vers l’orient et qu’on jette les yeux sur le terrain, on voit un fossé presque comblé qui traverse la plaine dans sa largeur, et qui aboutit à une maison isolée, à quelque distance de quatre moulins à vent placés sur la hauteur.


(Another view of the windmills / autre vue des moulins de Lutzen, au coeur de la bataille).

samedi 7 novembre 2009

Lützen 1632 (before the battle)


Voilà les évènements qui ont précédé la bataille d'après Gualdo.

Here are the events before the battle according to Gualdo.





Walstein (…) s’arrêta non loin de Nuremberg pour passer en revue son armée qui se trouva réduite à 36,000 hommes. Le comte de Galas qui conduisait l’arrière-garde eut ordre d’allumer tous les villages appartenant à la seigneurie de Nuremberg, et prit ensuite la route de la Misnie pour en déloger l’armée saxonne. Walstein (…) se flattait de rompre cette alliance (Saxo-suédoise) en envoyant en Saxe 10,000 hommes commandés par Holck et Galas qui avaient ordre de ravager ce beau pays (…)
Il donna aussi 4,000 fantassins et 1,500 chevaux au marquis de Grana qui eut ordre de s’établir dans le margraviat de Bayreuth en Franconie. (…)
Mais parce que le maréchal Horn était entré en Bavière avec 8,000 hommes d’infanterie et 4,000 chevaux, et qu’il jetait la consternation dans l’électorat, Maximilien sentit le besoin de voler au secours de son pays. Il y avait 14,000 hommes dans l’armée de Walstein, y compris les troupes d’Aldringer. Il courut assiéger Rain sur le Lech (…)
Walstein était fort affaibli depuis la séparation des Bavarois et avait encore à souffrir de la disette des vivres dans un pays ruiné. C’est ce qui lui fit prendre le parti d’abandonner les environs de Bamberg pour chercher à s’emparer de Cobourg, ville de Franconie aux frontières de la Thuringe avec un bon château. (…) Cobourg devait couvrir le flanc de Walstein lorsqu’il serait temps de se joindre à Holck et Galas et de ravager la Misnie de concert avec eux.
Gustave était avec l’armée à Neustadt sur l’Aisch entre Nuremberg et Bamberg, lorsqu’il apprit la séparation des Bavarois, et le dessin que Walstein avait de s’emparer de Cobourg pour être plus à portée de prêter la main à Holck qui était déjà dans la Misnie, et à Galas qui sans doute y était aussi. Gustave vit la nécessité de sauver la Saxe pour se conserver un allié qui pouvait lui échapper. Il donna des troupes au duc de Weimar qui forma un camp d’observation du côté de Sendelbach près de Nuremberg, avec ordre de ne pas perdre de vue Wallenstein, et d’avertir le roi de l’approche de Pappenheim qui revenait à grandes journées pour tomber aussi sur les malheureux saxons. (…)

Gustave laissa 5,000 hommes d’infanterie et 2,000 chevaux au duc Christian Palatin de Birckenfeld pour garder la frontière de Souabe du côté de la Bavière. Avec le reste de son armée qui était de 7,000 chevaux et de 10,000 fantassins, le monarque retourna devant Nuremberg et vengea cette ville de l’insolence de la garnison de Lauf qu’il remit à la discrétion des Nurembergeois. Il voulut traiter de même Lachtenau (…) Il chargea de ce soin le colonel Sperreuter à qui il laissa 3,000 hommes. (…) Le comte de Gronsfeld resta dans l’évêché d’Hildesheim avec 7,000 hommes pour faire le siège de Neubourg, place forte sur l’Aller, et Pappenheim courut sur Erfurt. (…)
Gustave pour ménager ses troupes les avait partagées en deux corps (…) Le corps sous les ordres du duc Bernard arriva. Gustave fit assembler les généraux et voulut que chacun dit librement sa pensée sur le parti qu’il y avait à prendre. (…)
Il passa son armée en revue qui se trouva forte de 27,000 hommes, 16,000 fantassins et 11,000 chevaux. L’avant-garde aux ordres du duc Bernard de Weimar était de 4,000 cavaliers allemands et finlandais, de 1,000 dragons et de 6,000 fantassins, distribués en 6 gros bataillons. Le corps de bataille que commandait le maréchal de Knyphausen était également de 6,000 hommes d’infanterie en trois corps et de 4,000 chevaux en 8 gros escadrons. Le Roi menait l’arrière-garde composée de 1,000 cuirassiers d’élite, de 1,000 dragons et de 4,000 fantassins partagés en gros bataillons et escadrons comme ceux de l’avant-garde du corps de bataille, et les escadrons de la réserve ayant chacun cinq pièces de campagne qui couvraient le front. (…)
Walstein avait levé le siège du château de Cobourg, pris Leipzig, et occupé tout le terrain depuis cette ville jusqu’à Merfebourg et Weissenfels sur la Saale. Gustave courut s’emparer de Naumbourg sur la même rivière un peu au dessus de Weissenfels et plus près d’Erfurt. Naumbourg le rapprochait des Saxons qui étaient alors aux environs de Torgau sur l’Elbe avec 12,000 fantassins et 4,000 chevaux, occupés à s’opposer aux desseins de Walstein.

(Walstein) venait d’être renforcé des 9,000 hommes de Pappenheim, et la jonction de ces deux généraux maîtres des meilleurs postes empêchait les Saxons de se joindre à l’armée du Roi.
Le monarque suédois attendait le moment d’attaquer avec avantage, lorsqu’on vint lui dire que Walstein avait abandonné Weissenfels, et resserrait ses quartiers autour de Lutzen a deux lieues de Leipzig, et que Pappenheim prenait le chemin de Halle sur la Saale afin de couper le passage au duc de Lunebourg qui marchait à grandes journées pour se joindre aux Saxons, et venir renforcer la grande armée. Gustave ne voulut point attendre ce secours qui était encore éloigné, et résolut de profiter de l’absence de Pappenheim et des meilleures troupes pour tomber sur le camp de Walstein. Il se mit en marche et fit prendre les devants à ses braves finlandais.
Walstein qui pénétrait les vues du roi vit qu’il était attaqué. (…) Il convint secrètement avec Pappenheim de ne point attaquer et de laisser le roi courir à son malheur ; mais il fut dit que celui sur qui il avancerait le premier en donnerait avis à l’autre par trois coups de canon. (…)
Le roi, qui ne savait rien de cette convention, hâta sa marche et se trouva bientôt à la vue du camp des impériaux dans la plaine de Lutzen. Walstein donne aussitôt son signal d’avertissement et dépêche des gens de confiance vers Pappenheim pour le rappeler. Mais craignant que le roi ne commençât l’attaque dès le lendemain matin avant que Pappenheim pût arriver, il profita d’un fossé qui traversait la campagne, et employa toute la nuit à le faire déblayer et à l’élargir. Ce fossé qui couvrait le front du camp fut garni de mousqueterie et de canons. Walstein en était plus fort, mais les Suédois le voyant retranché en furent plus hardis à l’attaquer. Il y eut à cette occasion divers chocs de cavalerie. La perte fut assez égale ; mais les Suédois restèrent maîtres du terrain, parce que Walstein ne voulut pas quitter son fossé que Pappenheim ne fût arrivé. (…)

Lützen 1632 (préambule)

Pour contribuer à l'organisation d'une reconstitution de la bataille de Lützen, je vais consacrer plusieurs articles à cette bataille. Ma principale source contemporaine étant l'oeuvre de Galeazzo Gualdo Priorato, auteur de l'Histoire des dernières campagnes de Gustave-Adolphe, ce premier message est consacré à la présentation de l'homme.

To contribute to the simulation of the Battle of Lützen, I'll spend several articles on this battle. My main source is the contemporary works of Galeazzo Gualdo Priorato, author of History of past campaigns of Gustavus Adolphus, the first message is devoted to the presentation of Gualdo.


Le comte Galeazzo Gualdo Priorato est un militaire contemporain de Gustave-Adolphe qui a servi volontairement dans les deux armées, impériale et protestante, uniquement pour s’instruire. Son témoignage est donc neutre, il ne prend pas parti, et ne peut être suspect, comme le dit son traducteur : Il a cherché à dire la vérité. S’il ne l’a pas toujours connue, il a du moins le mérite de rendre avec intelligence quelques détails d’une guerre qui tient une place distinguée dans l’histoire militaire du siècle passé.
Galeazzo Gualdo Priorato se présente ainsi :
« Dès que je fus en âge de porter les armes, mon père qui était le comte Nicolas Gualdo Priorato mestre-de-camp au service de la République de Venise voulut que je travaillasse à me rendre digne de lui succéder un jour dans les emplois honorables qu’il avait trouvés dans la famille. Je fus d’abord envoyé en Hollande à l’armée du grand Maurice d’Orange, et j’y servis trois ans sous M. Hauterive colonel français. De là je fus à l’armée du comte Ernest Mansfeld qui faisait la guerre en Allemagne. Je m’arrêtai aussi quelque temps en France pour y prendre une idée de la guerre des Huguenots (vers 1627-28). de là je passai en Angleterre comme on y levait des troupes destinées au rétablissement de l’électeur Palatin. Les troubles survenus au Piémont et dans la Valteline (1629) me paraissant une meilleure école, j’y courus, et je restai en Lombardie tant que dura la guerre de Mantoue, qui ne fut pas longue (1631). j’avais envie de revoir l’Allemagne ; ainsi je me rendis à l’armée de Walstein (1632), où je m’arrêtai longtemps; je ne quittai même que parce que la mort de mon père arrivée dans l’île de Zante comme il revenait de son gouvernement de Candie me rappelait dans ma famille. mais je ne tardai pas à revenir en Allemagne : l’armée suédoise y était en trop grande estime pour ne pas chercher à la connaître. dans ce dessein je m’attachai au maréchal Horn (mort en 1634) et depuis au duc de Weimar auprès de qui je restai quelques années. (…)
J’étudiais la conduite des Chefs et leurs caractères. (…) A l’armée je voyais à quoi tient souvent la réussite la réussite d’une entreprise : combien il est nécessaire de connaître le local d’un pays, les moeurs de ses habitants, l’assiette et la force des places, les cours des eaux, les passages importants, les troupes dont on a le commandement, le temps, le lieu, enfin tout ce qui concourt à l’exécution du projet le mieux concerté et qu’un rien peut déranger.
J’écrivais mes observations à mesure, et j’en ai conservé des mémoires aussi détaillées que mes lumières et la brièveté du temps me l’ont permis. j’ai depuis rassemblé ces matériaux et je les ai fourni au jugement de mes amis. (…)
Au reste je suis sûr de ce que j’ai vu ; je ne réponds pas également des mémoires qui m’ont été fournis. L’esprit de parti fait qu’on ne dit jamais les choses comme elles sont, mais comme on voudrait qu’elles se soient passées; il n’y a princes ni ministres qui tiennent, je n’ai pas plus de foi à leurs relations qu’à celles des autres, parce que je sais qu’on peut les tromper… J’ai eu du moins la précaution de faire un choix dans les mémoires qui m’ont été communiqués. je n’ai employé que ceux de personnes qui m’ont dit avoir été présentes; Encore ai-je bien fait la différence d’un rapport à un autre, parce qu’il y a des gens qui voient mal ou qui manquent de mémoire, qui renversent l’ordre des faits (…)
A Venise, le 2 juin 1640. »

vendredi 6 novembre 2009

French Army in 1636, an ordinance


(a horseman from E. Meissonier)

L'ordonnance de 1639 présentée récemment a été précédée de plusieurs autres. En voilà une autre, prise en 1636, au moment du siège de Corbie. L'intérêt de celle-ci par rapport à la précédente, c'est quelle donne les raisons de l'abandon de la cuirasse par les officiers et les soldats.


Here is an ordinance, preceding the one of 1639 recently presented, taken in 1636 during the siege of Corbie. This one also gives the reasons for the lack of armor among the officers and soldiers. Louis XIII order to wear - at least - the cuirasse (breastplate) for horsement and the corselet for footmen.


Ordonnance du 14 juillet 1636 pour obliger les gens de guerre à prendre leurs armes allants au combat
Sa Majesté ayant été avertie que les chefs officiers et soldats de ses troupes vont pour la plupart aux occasions de la guerre, même aux assauts et combats, sans avoir les armes qu’ils sont obligés de porter pour la conservation de leurs personnes suivant les ordonnances, et considérant combien il importe de leur faire perdre cette mauvaise coutume qui ne s’est introduite parmi eux que par la vanité de quelques-uns qui ont cru montrer davantage en ce faisant qu’ils n’avaient point d’apprehension du péril, ce qui a fait que plusieurs de la valeur desquels on pouvait attendre de longs et signalés services à l’état sont demeurés en la première occasion où ils ont exposé leur vie. Sa Majesté voulant empêcher la continuation d’un abus de telle conséquence, ordonne et enjoint à tous chefs officiers et soldats de ses troupes tant de cheval que de pied étant dans ses armées ou en garnison dans ses places de frontières de porter ordinairement leurs armes selon la qualité de chacun d’eux, savoir pour les gens de cheval la cuirasse pour le moins, ou pour l’infanterie le corset, et lorsqu’ils seront en faction de s’armer de leurs armes complètes, à peine de désobéissance, mande et ordonne Sa Majesté à ses lieutenant-généraux en ses armées, maréchaux de camp ayant commandement sur ses troupes et gouverneurs de ses places frontières de tenir exactement, la main à la publication et exécution de la présente ordonnance en tous les quartiers et lieux que besoin sera à ce qu’aucun n’en prétende cause d’ignorance.
Fait à Paris le 14e de juillet 1636.

jeudi 5 novembre 2009

Lützen 1632




Lützen. Bataille emblématique de la guerre de 30 ans, aux côtés de La Montagne Blanche, Breitenfeld, Nordlingen ou encore Rocroi. Gustave y trouva la mort et Wallenstein parvint a stopper les suédois, même si c'est lui qui quitta le champs de bataille.

Les cartes ci-dessous, extraites de la gazette allemande du temps (Theatrum Europaeum), même si elles sont contemporaines, sont fausses.
Les impériaux y sont représentés alignés en lourde formation de Tercios, formation que Wallenstein abandonna après Breitenfeld. Les bataillons de Wallenstein étaient en fait de petites unités de 500-1200 hommes sur 10 rangs (et non 50 comme les tercios). Les espagnols eux-même se déployèrent sur 8-10 rangs à Nördlingen en 1634. Sur les 10 rangs, il y en avait, au milieu, 7 de piquiers (plus 3 de mousquetaires sur leur front)... parce que Wallenstein tenait à ce que les couleurs du bataillon soient piles au milieu du bloc de piquiers ! (voir R. Brzezinski ou W.P. Guthrie sur le sujet). D'après Guthrie, un témoin protestant aurait affirmé que "l'armée ennemie était organisée comme la nôtre". Et Wallenstein se serait inspirée des théories de Basta qui suggérait de déployer un régiment de 3,000 hommes en 3 bataillons de 1,000 hommes sur 12 rangs.

Ces dispositions (bataillons "en ligne" et non en tercio) sont confirmées par d'autres peintures et gravures : celle du "Swedish Intelligencer" britannique, daté de 1633 ou encore le tableau de Pieter Snayers, réalisé en 1642.

























Lützen. Iconic battle of the thirty years war, alongside the White Mountain, Breitenfeld, Nordlingen or Rocroi. Gustave was killed and Wallenstein has managed to stop the Swedes, even if he left the battlefield.

The maps below, taken from the German newspaper of the time (Theatrum Europaeum), even if contemporary, are false.
The imperialists are represented aligned in heavy tercio formation, training that Wallenstein abandoned after Breitenfeld. The battalions of Wallenstein were made of small units of 500-1200 men in 10 rows (and not 50 as tercios). The Spaniards themselves are displayed on 8-10 rows at Nördlingen in 1634. Of the 10 rows, there were, in the middle, 7 of pikemen (plus 3 musketeers on their forehead) ... because Wallenstein wants the colors of the battalion to be in the middle of the block of pikemen ! (see R. Brzezinski or WP Guthrie on the subject). According to Guthrie, a Protestant witness reportedly said that "the enemy’s army was organized like ours." And Wallenstein was inspired by theories of Basta , who suggest to deploy a regiment of 3,000 men in 3 battalions of 1,000 men in 12 rows.

These provisions (battalions "in line" and not in tercio) are confirmed by other paintings and engravings : that of "Swedish Intelligencer" British, dated 1633 or even painting by Pieter Snayers, completed in 1642.

dimanche 1 novembre 2009

French cavalry, 1639-40


(Cavalier français par Ernest Meissonier)

J’ai retrouvé récemment une très intéressante ordonnance datée du 27 mars 1639 et portant sur la cavalerie. On apprend ainsi que Sa Majesté ordonne et enjoint très-expressément à tous mestres de camp, colonels, & capitaines de cavalerie, tant française qu’étrangère, de faire armer leurs cavaliers de la cuirasse devant et derrière, du pot, de deux pistolets, et de l’épée (…)
Les ordonnances sont intéressantes à plusieurs titres : elle nous apprennent ce que doit être la norme et, par déduction, ce que sont les usages.
Celle-ci se distingue par la fermeté avec laquelle le roi tente d’imposer cuirasse, pot (capeline), épée et pistolets, ces équipements devant être fournis par les magasins du roi. Les sanctions pour les contrevenant sont très lourdes. On y apprend aussi que d’autres ordonnances avaient précédemment essayé d’imposer ces dispositions et que les “traités” réalisés avec les mestres de camps, colonels et capitaines en stipulaient de même.
On en déduit que, entre 1635 et 1639, peut-être sous l’influence des cavaliers weimariens, l’équipement des chevaux légers français a eu tendance à s’alléger (pas de cuirasse, chapeau) de façon massive. Pour que le roi réagisse si fermement, une bonne proportion des cavaliers, peut-être de l’ordre du tiers, peut-être même la moitié, devaient avoir abandonné ces équipements, ce que confirment de nombreuses gravures d’époque.
Au vu de la lourdeur des sanctions, on peut aussi supposer que les choses ont eu tendance à rentrer dans l’ordre… au moins pour l’année qui suivit cette ordonnance !

I recently found a very interesting king’s ordonnance, dated March 27, 1639 dealing with cavalry. We learn that His Majesty ordered and directed very specifically to all mestre de camp, colonels, and captains of cavalry, both French and foreign, to arm their riders with front and back breastplate, the pot (or “capeline”, or lobster), two pistols, and the sword (...)
Ordonnances are interesting for several reasons: it tells us what should be the norm and, by inference, what are the uses.
This one distinguished by the firmness of the king trying to impose armor, pot, sword and pistols, such equipment to be provided by king's stores. Sanctions for violation are very heavy. We also learn that other ordonnances had previously tried to impose these provisions and that the "treaties" made with the mestres de camp, colonels and captains stipulated as well.
I conclude that between 1635 and 1639, perhaps under the influence of Weimar riders, horse equipment of chevaux-légers tended to become lighter (no armor, hat) in a massive way. For the king react so strongly, a good proportion of the horsemen, perhaps around a third, perhaps half, should have abandoned this equipment, what confirm many 17th century’s prints. Given the heavy penalties, we can also assume that things tended to return normal ... at least for the few years following that ordonnance !
















L'ordonnance du 27 mars 1639

De par le Roy,

Sa Majesté voulant pourvoir à ce que toute sa cavalerie soit armée conformément à ses précédentes Ordonnances, et aux traités faits avec les mestres de camp, colonels et capitaines de chevaux légers ; Sa Majesté ordonne et enjoint très-expressément à tous mestres de camp, colonels, & capitaines de cavalerie, tant française qu’étrangère, de faire armer leurs cavaliers de la cuirasse devant et derrière, du pot, de deux pistolets, et de l’épée, sans que ceux de qui les cavaliers ne se trouveront point armés en la manière susdite, puissent être et réputés avoir satisfait aux Ordonnances, ni aux conditions des traités qu’ils ont faits pour la subsistance de leurs compagnies, pendant le présent quartier d’hivers ; et pour les rendre complètes, veut et ordonne sa Majesté que tous les capitaines dont les cavaliers ne seront point armés dans le quinzième du mois d’avril prochain, comme il est dit ci-dessus, soient contraints non seulement à payer le prix des armes qui leur défaudront, mais aussi à restituer tout ce qu’ils auront touché pour leur subsistance dans leurs quartiers d’hivers, et pour leurs recrues. Que si les cavaliers auxquels les chefs vérifieront avoir fourni des armes viennent au rendez-vous de l’armée sans les avoir, ils soient arrêtés sur le champ, et punis exemplairement. Que si dans quelque combat ou autre occasion de guerre où les cavaliers se seront trouvés avec commandement, ils ont perdu leurs armes en se défendant, ou si elles ont été prises dans le bagage par les ennemis, leur capitaine soit tenu de leur en fournir 8 jours après, lesquelles sa Majesté lui fera donner des magasins qui seront pour ce établis en chacune province, en en fera retenir le prix sur la première montre ; qu’à chaque montre ou revue tous cavaliers prêteront serment de garder leurs armes ; et aucun n’y pourra être passé s’il n’est armé comme dessus, si ce n’est que son capitaine justifie que depuis que l’armée aura été à la campagne il ait perdu ses armes en un combat ou prise de bagage, et encore que pour cette cause un cavalier se trouve dépourvu d’armes, néanmoins l’argent de la montre ne sera point délivrée à son capitaine qu’après qu’il lui aura baillé d’autres armes. Que tout capitaine de cavalerie, ou officier qui en son absence commandera la compagnie, soit tenu d’avertir le mestre de camp ou colonel, ou celui qui commandera le corps du régiment, des cavaliers qu’il aura sans armes, pour les faire punir sur le champ suivant la rigueur de la présente si c’est par leur faute, ou pour y pourvoir s’ils les ont perdues en une occasion de guerre où ils aient été commandés. Et que si ledit capitaine ou officier commandant le compagnie manque à en donner avis, il soit sur le champ cassé ou dégradé des armes. Que tout mestre de camp de cavalerie, ou colonel, soit obligé de faire tenir son régiment entièrement armé, et si après qu’il aura été averti qu’il y ait quelque manquement, ou après qu’il l’aura dû reconnaître il ne le fait incontinent réparer, et punir celui qui sera trouvé en faute, il soit privé de sa charge ; et que tout commissaire qui aura passé à la montre un cavalier sans armes soit aussi privé de sa charge, s’il est commissaire ordinaire, sinon qu’il soit déclaré à la tête de l’armée incapable de jamais posséder charge.
mande et ordonne sa Majesté à ses lieutenants généraux en ses armées, et maréchaux de camp ayant commandement sur ses troupes, de faire ponctuellement observer la présente ; et sur les avis qu’ils auront, ou sur ce qu’ils connaîtront eux-même en voyant les troupes, des contraventions à la présente, de faire punir les coupables sur le champ à la tête de toutes les troupes, en vertu de leur simple ordonnance, sans autre forme de procès (…).